Les sorties culturelles du Morbihan

N° 401 - 2 mai 2024

plages de danse
Et si vous chaussiez tongs et lunettes de soleil pour aller voir
 un spectacle de danse ? VoilĂ  l’expĂ©rience originale que propose tous les deux ans le festival Plages de danse. L’évĂ©nement rĂ©unit, Ă  chaque Ă©dition, palanquĂ©e de danseurs, chorĂ©graphes, circassiens, bien dĂ©cidĂ©s Ă  investir l’espace public ainsi que les bords du Golfe ou les rives de l’ocĂ©an. De la baie du Lindin Ă  la cale de PencadĂ©nic, de Port aux Moines Ă  la plage de Port-Navalo, c’est toute la presqu’üle de Rhuys qui s’anime. Le programme, trĂšs chargĂ© cette annĂ©e, convoque tous les styles et tous les genres, et toujours dans un dialogue poĂ©tique entre la nature et la danse. Plages de danse, ce sont aussi des expositions, des impromptus, des projections, et des ateliers pour tous les Ăąges et dans tous les styles, sur rĂ©servation. Un temps hors du temps, dĂ©licieuse dĂ©ambulation gĂ©ographico-artistique.
> Du jeudi 8 au dimanche 12 mai, Presqu'ĂŻle de Rhuys (Organisation L'Hermine)
> Tous les spectacles sont gratuits, sauf "Rave Lucid", le 8 mai à 20h à l’Hermine, Sarzeau
> Tout le programme ICI
TITRE COUP DE COEUR
marcowicz et olivier
PEU DE CHANCES QU'IL RESTE DES PLACES, MAIS...
On vous signale quand mĂȘme une soirĂ©e textes et musique avec AndrĂ© Marcowicz, oui oui, le traducteur de Tchekhov dont on vous parle tout le temps, et Christian Olivier, fondateur du groupe TĂȘtes Raides ! AccompagnĂ©s par le guitariste Martial Bort, ils proposent un voyage d'une heure dans l'univers poĂ©tique de treize auteurs, en russe ou en français, en chanson et en lecture : Vladimir MaĂŻakowski, Boris Pasternak, SerguĂ©ĂŻ Essenine,Anna Akhmatova, Daniil Harms, Alexandre Blok, Ivan Bounine, Ossip Mandelstam, Maximilian Volochine, Ilia Zdanevitch, VĂ©limir Khlebnikov, Marina TsvĂ©taĂŻeva, Alexandre Pouchkine... (Photo Hadrien Picard)
> Jeu 2 mai à 20h à La Dame Blanche, Port-Louis, sur réservation au 02 97 82 45 11
bumcello
BUMCELLO
A eux deux ils font les meilleurs concerts de la terre. Violoncelle et percus, Vincent Segal et Cyril Atef. Aucun concert de Bumcello ne ressemble à un autre, c'est de l'impro, de la complicité, du délire parfois mais toujours une expérience de pure créativité et d'écoute...
> Ven 3 mai à 20h30, Athéna, Auray
PETIT LIEN PROGRAMME SEMAINE
omme 5
Omme 5
Chaque annĂ©e, on vous invite Ă  aller faire un tour du cĂŽtĂ© de Clohars-CarnoĂ«t pour dĂ©couvrir les propositions des artistes invitĂ©s de « Omme ». Pour cette cinquiĂšme Ă©dition, le principe est le mĂȘme : ouvrir un temps de rĂ©sidence autour d’un thĂšme, et restituer sous forme de performances (c’était la semaine derniĂšre) puis d’une exposition. Sur le thĂšme du feu, sept artistes ont donc travaillĂ© pour des rĂ©sultats, qui, comme toujours, vont laisser certains visiteurs sur le bas-cĂŽtĂ© et d’autres les intriguer ou les Ă©mouvoir, c’est le jeu, avec quand mĂȘme ce truc de sortir des chemins balisĂ©s, de tenter, de tester, et c’est quelque chose qu’on aime bien, cette prise de risque qui fait de l’art autre chose qu’un produit de consommation. Parmi les propositions, certaines nous ont donc moins touchĂ©s, et d’autres ont Ă©veillĂ© quelque chose. Pour ne pas jouer Ă  qui-Ă -produit-quoi, nous avons choisi de vous parler d’une seule proposition, parce qu’elle a gĂ©nĂ©rĂ© en nous une Ă©motion, et un charme. Il s’agit d’un film d’animation de 12 minutes, rĂ©alisĂ© par Irina Warner, artiste originaire de Hambourg et vivant Ă  Barcelone, qui parle avec pudeur du phĂ©nomĂšne d’emprise et des relations toxiques crĂ©Ă©es par les personnalitĂ©s manipulatrices. RĂ©alisĂ© grĂące Ă  des papiers dĂ©coupĂ©s projetĂ©s, le film prend la forme d’un conte, oĂč les personnages sont des animaux, sur un joli texte fluide et poĂ©tique, trĂšs simple, qui s’écoute avec Ă©motion au fur et Ă  mesure que l’on comprend qu’il s’agit ici de la mĂ©taphore d’une histoire personnelle et douloureuse.
> Omme 5, avec les Ɠuvres de Mathilde Abraham (Belle-Île), Alfred Mauve (Catalogne), Martine Saurel, (TrĂ©gunc) Victorien Ezard (Lille), Perrine Coquin (Brest), Ionolutrev (Douarnenez) et Irina Warner (Catalogne).
> Chapelle Saint-Jacques, Clohars-CarnoĂ«t, jusqu’au 28 mai. Ouvert les vendredis de 15h Ă  18h et les samedis/dimanches de 16h Ă  19h
DILEMME
Attention, cette annĂ©e les trois festivals de danse, arts de rue et cirque les plus sympas de mai auront lieu le mĂȘme week-end... Il va falloir faire des choix !

đŸ‘ïžâ€đŸ—šïž Plages de danse, en presqu'Ăźle de Rhuys, du jeudi 8 au dimanche 11 mai
đŸ‘ïžâ€đŸ—šïž Avis de temps fort, sur la rive gauche de la rade de Lorient, du jeudi 9 au vendredi 10 mai.
đŸ‘ïžâ€đŸ—šïž Des ronds dans l'eau, Site de la Poterie, Hennebont, du vendredi 10 au dimanche 11 mai.
CURIOSITE
qui partent
Qui partent ? Un film de Fred Périé

« Ça n’a pas Ă  ĂȘtre compris ; ça n’a pas Ă  ne pas ĂȘtre compris »

VoilĂ  la phrase qui sert d’exergue, de refrain, de commentaire, au film de Fred PĂ©riĂ©, qui tente de mettre en forme cinĂ©matographique ce qui se passe dans la vie de ceux qui restent aprĂšs la mort d’un proche. FilmĂ© Ă  la maniĂšre de PĂ©riĂ©, Ă  savoir dans une poĂ©sie bien Ă  lui, si personnelle qu’il faut l’accepter comme un langage Ă©tranger que l’on ne comprend pas forcĂ©ment mais dont on perçoit la musique, les intentions, le parfum.

DĂ©calĂ©, onirique, brumeux, parfois burlesque Ă  la maniĂšre de Harold Lloyd, « Qui partent » rĂ©unit un groupe de gens que l'on suit dans leurs dĂ©ambulations et rencontres aprĂšs le dĂ©cĂšs de l’un d’entre eux. Les personnages traversent l’écran, dans la nature, dans des cuisines ou des jardins, sans que vraiment narration soit faite. Cet Ă©tat de bĂ©ance, de vacance, de vide et d’étrangetĂ© suite Ă  la mort d’un proche, il est lĂ , dans ces visages et ces corps qui ne savent pas trĂšs bien quoi faire pour dire adieu, qui sont lĂ , dans des lieux avec lesquels, tout d’un coup, ils se sentent moins complices. Dont ils ne font plus partie. Ou moins partie. Comme superposĂ©s.


Pour ĂȘtre tout Ă  fait honnĂȘte, et malgrĂ© le bien-fondĂ© de la forme visuelle du film, on l’aurait prĂ©fĂ©rĂ© plus court, l’expĂ©rience pouvant s’avĂ©rer un peu ardue pour un spectateur en quĂȘte d’action. On ne saurait donc que trop vous conseiller de vous prĂ©parer Ă  vous laisser aller dans cette forme lente et contemplative, sans impatience, afin de goĂ»ter ce moment singulier et exigeant.
> Sam 4 mai Ă  20h, Le City, Lorient
> Sam 24 mai Ă  20h, Salle audiovisuelle, Riantec

đŸ‘ïžâ€đŸ—šïž « Qui partent » a Ă©tĂ© filmĂ© en Morbihan, avec des comĂ©dien·ne·s de la rive gauche de Lorient, que certains d’entre vous s’amuseront peut-ĂȘtre Ă  reconnaĂźtre.
TITRE ISABELLE NIVET
vies
Vies silencieuses

Habituellement, je n’aime pas trop entrer dans la tambouille. MĂȘme si j’aime comprendre et toucher les processus de crĂ©ation, j’ai tendance Ă  penser que ce qui intĂ©resse le spectateur, c’est ce qu’il a sous les yeux, et moins comment les artistes en sont arrivĂ©s lĂ . Mais ici, dans ces « Vies silencieuses », il se trouve que simplement parler du rĂ©sultat serait incomplet, parce que c’est vraiment le chemin empruntĂ© qui a crĂ©Ă© les Ɠuvres que prĂ©sentent cinq artistes de la rive gauche de Lorient, Mireille SemrĂ©, Clotilde Aksin-Frappier, Franck Gourdien, Arthur Tima et Sophie Coiffier.

Ils sont amis et le travail qu’ils montrent Ă  L’EphĂ©mĂšre est le fruit de leurs rencontres, leurs conversations. Les dĂźners partagĂ©s, les verres bus, et surtout la confiance qu’ils se portent mutuellement. Oser montrer ses essais, ses erreurs, ses recherches, ses doutes, ses hĂ©sitations :

« Tous les cinq, nous nous sommes montrĂ© notre travail. PoussĂ©s Ă  crĂ©er par le regard des autres. On a redĂ©couvert une chose perdue : le groupe, Ă  la façon de mouvements comme le surrĂ©alisme ou le dada
 On a fait beaucoup de recherches ensemble, et individuellement aussi, pour nous confronter Ă  la nature morte et comment on pouvait lui apporter quelque chose de neuf ».

Les affinitĂ©s les ont enrichis, et lorsque l’on voit le rĂ©sultat de leurs travaux, on perçoit des correspondances subtiles, notamment dans le travail de Mireille SemrĂ©, artiste de LocmiquĂ©lic, Ă  laquelle on avait consacrĂ© un article en 2020 (Lire ICI). Un travail habituellement concentrĂ© sur des teintes sourdes, des traits esquissĂ©s sans conclusion, qui produisent ici, au contact d’autres identitĂ©s artistiques, des formes finies, des fruits beaucoup, dans des couleurs nouvelles, plus vives et plus denses. Est-ce l’influence de Clotilde Aksin-Frappier ? Les pastels de cette artiste, que nous ne connaissions pas, portent en effet une couleur d’une profondeur inĂ©dite, faisant oublier ce medium habituellement brumeux pour afficher des teintes d’une vivacitĂ© gourmande pour un rendu net et fort, produisant des dessins trĂšs dĂ©sirables.

Autour de ce que nous avons vu comme un duo, s’articulent les images et les mots. Des mots et des textes qui s’insinuent partout, Ă©crits, lus, jusque dans les courts-mĂ©trages rĂ©alisĂ©s par Franck Gourdien, comme des haĂŻkus audiovisuels, oĂč l’emploi de la camera obscura donne un ton poĂ©tique et minimaliste Ă  ces petits films dĂ©licieux au grain marquĂ©, qui se dĂ©gustent comme des macarons aux parfums indĂ©finissables et subtils, enrichis par la poĂ©sie des Ă©crits d’Arthur Tima, une poĂ©sie qui se nourrit des sensations, extrĂȘmement touchante, intime et pudique, que l’on partage et reconnait avec bonheur. Enfin se rajoutent les gravures et Ă©crits de Sophie Coiffier, qui strie de noir et blanc le papier de ses mots et dessins, dans ce qui tient plus d’une Ɠuvre collective que d’une exposition d’individualitĂ©s. « Vies silencieuses » passera un mois Ă  L’EphĂ©mĂšre, pendant lequel, chaque samedi, les artistes feront Ă©voluer l’accrochage, et proposeront des lectures, et, chaque dimanche, accueilleront un artiste invitĂ©.

> Du 3 au 31 mai Ă  la Galerie L’éphĂ©mĂšre, Port-Louis.

« Vies silencieuses » est une autre expression, datant du XVIIIe siÚcle, pour désigner les natures mortes.
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