Les sorties culturelles du Morbihan

N° 430 - 19 décembre 2024

sapin
Deux semaines d'interruption pour Sorties de secours, on se retrouve le 9 janvier, au petit-dĂ©jeuner, comme d'habitude. Et vous le saviez bien sĂ»r ? L'origine du mot dĂ©jeuner remonte au latin disjejunare, qui signifie « rompre le jeĂ»ne » et qui deviendra disjunare. Yup. C'est bien ce qu’on l’on fait le matin : on rompt le jeĂ»ne de la nuit en recommençant Ă  manger, et Ă  lire Sorties de secours.
magie lorient
Magie de Noël à la nuit tombée
La fĂȘte de NoĂ«l approche, Lorient s’illumine et s’anime pour prĂ©parer ce temps d’émerveillement.
Les réjouissances dans les rues piétonnes du centre-ville, dans les quartiers, les équipements culturels et les centres sociaux sont nombreuses et variées pour partager ensemble la joie de
cette fĂȘte. MarchĂ© de NoĂ«l, fanfares, fĂȘte foraine, spectacles et dĂ©gustations : les rendez-vous traditionnels du NoĂ«l lorientais reviennent, toujours dans un esprit festif et convivial. Un programme d’animations pour les petits et les grands dans une ambiance familiale et chaleureuse.
> Le programme ICI
isabelle nivet
berry good tips
AprÚs "Géraldine en transition", Géraldine Berry revient avec une nouvelle chronique. Au programme, trois, quatre ou cinq idées sur des choses engagées, militantes, citoyennes, et culture !
Mes suggestions du 19/12 au 25/12
C’est un peu plus calme au niveau de mes envies, parce que c’est la pĂ©riode des marchĂ©s de NoĂ«l et donc, voilĂ  c’est sympa, mais ça va un peu...

🟡 J’ai testĂ© la peinture sur cĂ©ramique au nouveau CafĂ© Ancrage, rue PoissonniĂšre Ă  Lorient, le week-end dernier. Je n’avais pas d’attente particuliĂšre, et bien c’est ultra-satisfaisant ! Un petit moment crĂ©atif et un objet personnel Ă  l’arrivĂ©e. À tester vraiment, je pense me refaire une petite session pendant les vacances. Il faut prendre rendez-vous sur leur site internet ICI et se laisser guider. Ouvert presque tous les jours.

🟡 Un grand classique cinĂ©ma Ă  l’École d’Art avec CinĂ© pour Tous : Aguirre la colĂšre de Dieu (1972) de Werner Herzog ce jeudi 19 Ă  18h30. NoĂ«l 1560. RĂ©sumĂ© : une armĂ©e de conquistadors espagnols part en quĂȘte du mythique Eldorado. L’expĂ©dition s’enlise dans la forĂȘt amazonienne. Un petit groupe part en Ă©claireurs. Don Lope d’Aguirre, commandant en second de cette Ă©quipĂ©e, fomente une mutinerie, sacre un soldat Empereur d’Eldorado et se nomme « traĂźtre suprĂȘme ». PremiĂšre collaboration entre Herzog et son acteur fĂ©tiche Klaus Kinski. Mention spĂ©ciale pour les affiches rĂ©alisĂ©es par les Ă©tudiant·es de l'option communication de l'Ă©cole d'art, trĂšs rĂ©ussies.
> AdhĂ©rent: 4€ / Non-adhĂ©rent: 6€ / Tarif rĂ©duit (-26 ans, sans emploi, RSA): 2€. Leur site ICI

🟡 Ça va danser au Bar d’en Face ce samedi soir 21 dĂ©c, avec Submarine PrĂžject. Au programme house, trancy, techno groovy et hard dance ! Pour celles et ceux qui ont encore de l’énergie en fin d’annĂ©e. Ça commence Ă  21 heures ! Place Polig Montjarret.

🟡 Dans le copieux programme de fin d’annĂ©e de la ville de Lorient, j’ai repĂ©rĂ© La Station de ski, ce dimanche 22 dĂ©c de 16h Ă  18h, place des halles Saint-Louis. Ça a l’air assez marrant, avec les machines et les moniteurs de ski de la Compagnie Machtiern. À coupler avec un vin chaud.

🟡 Rien à voir avec le sujet mais un article sur les tiny houses de Grandchamp, que j’ai envie de partager avec vous, parce que ça se passe prùs de chez nous : lire ICI

Pas d’idĂ©e de sorties jusqu’à la rentrĂ©e : on avisera sur le tas.
Rendez-vous le 9 janvier pour de nouvelles aventures so 2025 !

Souvent quand je bouge, je fais des story sur Instagram : @geraldineberry_lorient
jean clone
Je vous raconte ce que j'ai fait et vu vu ces derniers jours

Jean-Clone (vu au Théùtre du Blavet le 5 décembre)
Excellent collectif dont fait partie Julien Mellano, AĂŻe AĂŻe AĂŻe invente des spectacles aux propos et aux esthĂ©tiques constamment renouvellé·es. De la recherche, toujours, des questionnements sur comment faire rĂ©cit, comment faire théùtre, Ă  base d’objets, souvent. Un grand M sur le mot « mise en scĂšne ». Et cette fois, avec Jean-Clone (quel titre formidable !), de la mise en scĂšne, ma douĂ© benniget, il y en a. A peu prĂšs l’exact opposĂ© du minimalisme. MĂȘme si, et c’est chouette, on est ici dans du Ridley Scott low tech, des accessoires qui composent un univers de science-fiction complĂštement crĂ©dible.

D’une capsule-gousse-graine, sortent un Ă  un des clones verts, portant un costume aussi drĂŽle que malin, deux doudounes vertes, l’une enfilĂ©e normalement comme une veste, la seconde comme un pantalon. Entre la combinaison spatiale bio et le babygro petit-pois, les Jean-Clones portent un masque de simili Einstein, et une perruque blanche Ă©bouriffĂ©e. Sur l’exoplanĂšte oĂč ils ont atterri, le temps passe beaucoup plus vite que sur terre, ils n’ont donc chacun qu’une dizaine de minutes pour accomplir leur mission. Sans (trop) dĂ©voiler le spectacle (pas sĂ»r) on dira que la belle idĂ©e, c’est d’avoir utilisĂ© de la mousse Ă  mĂ©moire de forme pour crĂ©er des organismes Ă©tranges, qui « vivent » en scĂšne. C’est trĂšs beau, carrĂ©ment contemplatif. On jubile de voir comment Mellano s’est emparĂ© des sciences naturelles, de la biologie et de l’IA. Sans qu’on Ă©clate de rire, c’est futĂ©, imaginatif, rĂ©fĂ©rencĂ©, visuel mais aussi bourrĂ© de dialogues dĂ©calĂ©s, trĂšs simples mais franchement marrants, des conversations Ă  la fois loufoques et banales. Chaque clone qui dĂ©barque pose la mĂȘme question « C’est quoi cette merde ? » et s’étonne de la coiffure de son clone, avant de rĂ©flĂ©chir plus scientifiquement.

On comprend vite que le temps que les Jean-Clones comprennent le but de leur mission et tachent de s’en acquitter, ils seront tous morts. Et oui, c’est drĂŽle – enfin, pas tout le temps – mais surtout, on ressort de lĂ  avec 10000 questions ? Qui a envoyĂ© ces clones dans l’espace ? Est-ce une mission de colonisation ? Pourquoi l’IA n’a-t-elle pas trouvĂ© un moyen de s’alimenter en Ă©nergie pour poursuivre sa mission ? Les bactĂ©ries ont-elles pris le pouvoir ? Ont-elles affrĂ©tĂ© ce vaisseau pour permettre leur survie en utilisant les corps des Jean-Clones, qui, en se dĂ©composant, ensemenceront cette exoplanĂšte ? Est-ce la fin de l’espĂšce humaine ? Etait-ce une bonne idĂ©e de choisir des clones vieux – pour leur expĂ©rience et leur connaissances scientifiques – sachant qu’ils n’auraient que trĂšs peu de temps pour mettre en place leur hybridation avec la matiĂšre organique de la planĂšte ? Questions gĂ©niales, surfant sur les Ă©tudes pointant la relation maĂźtre/esclave que nous vivons avec les bactĂ©ries, les thĂ©ories survivalistes, le pouvoir de l’intelligence artificielle, les biotechnologies, le transhumanisme
 En rĂ©sumĂ©, une forme formidable et un fond fondamental, Jean-Clone va tourner beaucoup cette annĂ©e, on vous laisse trouver les dates sur le site de AĂŻe AĂŻe AĂŻe ICI
les pires
Escale Impro Théùtre avec Les Pires (vu au Théùtre de Lorient samedi 14 décembre)
J’attendais ce rendez-vous avec curiositĂ©, pour voir ce que des comĂ©diens professionnels – dont Simon DelĂ©tang, le directeur du théùtre de Lorient – allaient apporter Ă  un match d’improvisation mis en place en collaboration avec la troupe lorientaise « Les pires ». Hyper sĂ©duisant sur le papier du programme, le choc de deux cultures, des acteurs de Centre Dramatique National, habituĂ©s aux grands plateaux, aux textes contemporains, au silence du public, versus des comĂ©diens amateurs, pleins d’énergie, aux voix capables de passer par-dessus le brouhaha des bars Ă  biĂšre dans lesquels ils se produisent, quasiment assis sur les genoux de spectateurs qui jettent des chaussettes sur l’arbitre quand ils ne sont pas d’accord.
Simon DelĂ©tang arrive pour prĂ©senter la soirĂ©e, je repĂšre ses baskets, je me dis « Il s’est mis Ă  l’aise, c’est bon signe, ça va dĂ©poter ». Le rideau se lĂšve, Alicia Poder, maĂźtresse de cĂ©rĂ©monie, en jean Ă  paillettes, nullement dĂ©montĂ©e par la salle pleine, s’empare du micro et lĂ  – surpriiiiise ! - annonce que finalement, le match opposera les Pires
 aux Pires. Grosse dĂ©ception dans les rangs. On avait tous envie de voir ça, c’était une tellement bonne idĂ©e de mixer les esthĂ©tiques, les jeux, les personnalitĂ©s, les Ăąges, les statuts
 Alors, pour consoler les Pires, tout le monde a jouĂ© le jeu, votĂ©, criĂ©, gesticulĂ©, lancĂ© des chaussettes et applaudi. Et moi je dis « chapeau bas », parce qu’un plateau de CDN c’est autre chose que trois mĂštres carrĂ©s de carrelage couvert de biĂšre, et ils s’en sont bien sortis, mĂȘme si dĂ©finitivement, le théùtre d’impro, ça se vit au contact, une biĂšre Ă  la main !
le lieu

Photo de Julien Magre, exposé en 2017 au Lieu. Une belle rencontre et un énorme coup de coeur

Fermeture du Lieu de la photographie (13 décembre)
Etrange ambiance pour cet ultime rendez-vous au Lieu. Regards Ă©tonnĂ©s, chuchotements « T’étais au courant, toi ? », « Mais c’est fini alors ? », les fidĂšles de cette formidable galerie dĂ©diĂ©e Ă  la photographie contemporaine (oĂč j’ai formĂ© une grande partie de mon goĂ»t et de ma culture personnelle, et que je remercie au passage pour leur programmation exigeante, amoureuse et crĂ©ative) Ă©taient rassemblĂ©s. Mines graves et incomprĂ©hension.

Alors arrive le moment des discours, l’écoute est attentive.
Prendront la parole les membres de l’association, dont Emilie Teulon, directrice artistique et responsable pĂ©dagogique, qui rappelle, la voix un peu serrĂ©e, les chiffres depuis 2019 (Le Lieu existe depuis 1989, dans un autre local), raconte les 64 expositions Ă  l’HĂŽtel Gabriel depuis 2019, les 93000 visiteurs, les nombreux ateliers et confĂ©rences, les 148 artistes accueilli·es, les 16 rĂ©sidences, les 45 ans de soutien de la ville, la rĂ©gion, le dĂ©partement, la DRAC

Les officielles, Sophie Palant-Le Hegarat, pour la ville de Lorient, Delphine Alexandre, pour la RĂ©gion Bretagne, ainsi qu’une reprĂ©sentante du conseil dĂ©partemental, confirment officiellement leur soutien et leur engagement, affirmant (pour le dĂ©partement et la rĂ©gion) une « sanctuarisation du budget culture et une sĂ©curisation de l’association et une attention Ă  la suite du projet ».

Les raisons énoncées
Des travaux (2 millions d’euros annoncĂ©s) seraient nĂ©cessaires dans cette aile de l’HĂŽtel Gabriel, et il n’est pas prĂ©vu que la structure rĂ©intĂšgre les lieux aprĂšs. Pour Sophie Palant-Le Hegarat, le motif est le suivant « La ville de Lorient s'est vu renouveler son label « art et histoire », qui implique l’engagement de valoriser et entretenir le patrimoine par des expositions et de la mĂ©diation au sein d’un CIAP (Centre d’InterprĂ©tation de l’Architecture et du Patrimoine) Ă  crĂ©er. Pour la ville de Lorient, ce centre ne peut s’installer qu’à l’HĂŽtel Gabriel et ce, dĂšs le mois de septembre 2025 ».
Alors quid de l’avenir ? L’équipe a les valises Ă  la main, et toujours pas de point de chute. Pas de lieu pour Le Lieu. Un bureau et du chauffage vont leur ĂȘtre fournis et l’équipe se prĂ©pare au nomadisme, Ă  l’espace public, aux partenariats, notamment avec l’école d'art, Ă  la prochaine Ă©dition des Rencontres photographiques, Ă  l’automne prochain, et au bicentenaire de la photographie, en 2026. IdĂ©alement, l’espace d’accueil devrait se situer en centre-ville, et offrir au minimum 400 m2, si vous avez de la place dans vos locaux, n’hĂ©sitez pas. L’association cherche activement dans toutes les directions, bĂątiments publics ou privĂ©s, commerces fermĂ©s
 On ne peut que souhaiter une poursuite dans des locaux « en dur » pour cette association et son apport essentiel Ă  la vie culturelle lorientaise et plus largement bretonne

journla d'un fou
Rencontre avec la compagnie Les Célestines (5 décembre)
Oh, c’était un drĂŽle de moment pas drĂŽle, cette rencontre. La compagnie Les CĂ©lestines, c’est celle d’Erika. Mais Erika n’est plus lĂ . Erika Vandelet, figure solaire, joyeuse et soyeuse, passionnĂ©e, du théùtre de l’Echange, puis des CĂ©lestines. Erika et sa passion des beaux textes, sa chaleureuse sororitĂ©, sa maniĂšre de vous regarder bien droit avec des Ă©tincelles Ă  la fois moqueuses et bienveillantes, sa maniĂšre de vous voir. On lui a dit adieu Ă  l’église Notre-Dame-des-Victoires, un lundi matin d’octobre glacial et lugubre.
Alors se retrouver face Ă  ses acolytes, ses fidĂšles, ses amies, son fils. Woof.
En rĂ©sidence Ă  Larmor-Plage, pour achever les rĂ©pĂ©titions du Journal d’un fou, de Gogol, qu’Erika avait quasiment fini de mettre en scĂšne, l’équipe fait face comme elle peut, mais moi j’ai pas le cƓur de m’enthousiasmer comme d’habitude, alors je vais me contenter de vous livrer quelques extraits de notre Ă©change avec Fanny, RaphaĂ«l, VĂ©ronique, Djamila.

« Le projet tenait trĂšs Ă  cƓur Ă  tous. C’est un texte qui pose la question de la vĂ©ritĂ©, oĂč elle est, comment on lui Ă©chappe. Le hĂ©ros a une relation biaisĂ©e du rĂ©el. On assiste Ă  la montĂ©e de la folie du personnage, et sa folie croissant, comment il va s’en libĂ©rer, mais la sociĂ©tĂ© va devenir violente et lui faire payer sa diffĂ©rence. Erika avait choisi une ambiance Ă©purĂ©e sur le plateau, avec pour seul dĂ©cor un carrĂ© de lumiĂšre, favorisant un jeu serrĂ© dont le corps va progressivement se libĂ©rer.»
RaphaĂ«l Poli, qui joue le rĂŽle, est le fils d’Erika Vandelet, avait « une relation trĂšs forte avec (sa) mĂšre : on se retrouvait tous les trois ou quatre ans. C’est mon cinquiĂšme spectacle avec elle. Et les derniers mots du spectacle, c’est un monologue adressĂ© Ă  sa mĂšre. C’est un personnage qui passe du rire aux larmes, Ă  la folie, la violence, l’amour, l’innocence, presqu’un enfant. Pour moi, cette poursuite du projet est particuliĂšre et trĂšs intime parce que j’ai l’impression que ma mĂšre est avec moi sur le plateau. Les indications de jeu sont les derniĂšres choses que j’ai entendues d’elle »

Pour VĂ©ronique BrĂ©hier, qui reprend la mise en scĂšne, le spectacle est « drĂŽle et cruel, mais pas austĂšre. C’est trĂšs rythmĂ©, engagĂ© corporellement, c’est trĂšs digeste. Il y a une adresse directe au public, c’est son journal intime, qu’il livre au public comme du stand-up, mais c’est un monologue, un seul en scĂšne. L’objet artistique est celui d’Erika : le spectacle Ă©tait bouclĂ© Ă  90 % ».
> 25 et 26 jan l’Artimon, LocmiquĂ©lic, 2 mars Les Coureaux, Larmor-Plage, 8 mars Quai 9, Lanester.
raphael baldos
traction
Des animaux Ă  la ferme
« Oh, tu t’es encore tout crottĂ© ! » Cette phrase, un peu surannĂ©e, va peut-ĂȘtre revenir dans votre vocabulaire : le crottin est de retour. La traction animale fait son grand retour dans les champs bretons. Quinze ans aprĂšs les premiĂšres initiatives, ce mode de culture traditionnel sĂ©duit de plus en plus d’agriculteurs. Notamment les maraĂźchers, qui apprĂ©cient les avantages Ă©cologiques et Ă©conomiques des animaux domestiques.

Le retour du cheval de trait dans les exploitations s'inscrit dans une approche globale de l'agriculture durable. Les avantages sont nombreux : respect des sols, réduction de l'utilisation d'intrants chimiques, création d'un écosystÚme équilibré favorisant la biodiversité. Cette renaissance de la traction animale ne se limite pas aux chevaux : poules, moutons et dindes sont également mis à contribution dans les vergers et potagers, participant à l'entretien des cultures tout en diversifiant la production.

A Monterblanc, dans le Morbihan, RosĂ©lĂšne Pierrefixe et son compagnon Nicolas ont choisi une jument pour labourer les sols de leurs cultures de plein champ. D’autres animaux participent Ă  la vie de cette « micro-ferme » : entre les serres et les cultures de plein champ, parmi d’honorables vieux arbres, des poules travaillent et alimentent le sol de leurs dĂ©jections. Et des moutons paissent sur des parcelles en jachĂšre qui se rĂ©gĂ©nĂšrent doucement. La famille vit de la production de la ferme : les lĂ©gumes, les Ɠufs et les quelques fruits cultivĂ©s sur 0,5 des 5 hectares de l’exploitation sont vendus sur les marchĂ©s de Saint-AvĂ© et Plescop, Ă  un restaurateur et Ă  un distributeur bio. « On peut cultiver beaucoup sur de petites surfaces. C’est intĂ©ressant vu les problĂ©matiques fonciĂšres et d’urbanisation », observe RosĂ©lĂšne Pierrefixe.

Contrairement aux idĂ©es reçues, la traction animale peut s'avĂ©rer Ă©conomiquement viable. Si la productivitĂ© est moindre qu'avec un tracteur, les agriculteurs compensent par la vente directe et des prix plus Ă©levĂ©s. Et l'investissement initial est aussi plus faible, limitant l’endettement.
Le choix de la traction animale répond à des motivations profondes chez les paysans qui l'adoptent.

Au-delĂ  d'une simple dĂ©marche Ă©cologique, c'est souvent l'expression d'une vision engagĂ©e de l'agriculture, oĂč la recherche d'autonomie se conjugue avec un profond respect du vivant. Cette approche traduit Ă©galement une vĂ©ritable passion pour les animaux de trait, qui deviennent de vĂ©ritables partenaires de travail. « Mon cheval n'est pas qu'un outil, c'est un collaborateur avec qui je dois Ă©tablir une relation de confiance », disent en substance les paysans qui ont fait ce choix.
Sur le plan technique, la traction animale offre des avantages significatifs qui justifient son regain d'intĂ©rĂȘt. Le travail avec les animaux permet une plus grande prĂ©cision dans les interventions culturales et prĂ©serve la structure du sol, Ă©vitant le tassement provoquĂ© par les engins motorisĂ©s lourds. Cette mĂ©thode traditionnelle reprĂ©sente aussi pour beaucoup une forme de rĂ©sistance Ă  l'industrialisation de l'agriculture, permettant aux exploitants de s'affranchir de leur dĂ©pendance aux Ă©nergies fossiles et aux constructeurs de machines agricoles.

Serge Le Louarn, dans les CĂŽtes d’Armor, est un prĂ©curseur du dĂ©bardage Ă  cheval. Je l’ai rencontrĂ©, Ă  plusieurs reprises, dans sa ferme de Lanrivain. « On coĂ»te forcĂ©ment plus cher que la machine, mais il n’y a pas de comparaison possible avec la mĂ©canique », confie-t-il. Acteur de la filiĂšre Ă©quine depuis 1990, il est co-crĂ©ateur du rĂ©seau professionnel DĂ©bardage Cheval Environnement (DCE). « Travailler avec du vivant impose d’autres contraintes. « Les chevaux sur les chantiers sont des athlĂštes qu’on ne peut pas arrĂȘter et redĂ©marrer comme des machines », avertit-il.
L'impact écologique bénéfique de la traction animale se mesure d'abord dans la préservation des sols agricoles. Contrairement aux tracteurs dont le poids peut atteindre plusieurs tonnes, les chevaux de trait exercent une pression limitée sur la terre, évitant ainsi le tassement qui étouffe la vie microbienne et perturbe les cycles naturels. Cette moindre perturbation du sol, combinée à un travail plus précis et moins profond, favorise le développement d'une flore naturelle diversifiée et le maintien d'une riche biodiversité dans les parcelles cultivées.

La traction animale s'inscrit également dans une logique de sobriété énergétique et d'agriculture circulaire. Les chevaux se "rechargent" avec l'herbe des prairies et produisent un fumier précieux pour la fertilisation des cultures. Ils permettent ainsi de réduire drastiquement la consommation de carburant fossile et d'engrais chimiques. Et créent ainsi un cercle vertueux : l'exploitation devient plus résiliente, moins dépendante des fluctuations des prix du pétrole, tout en contribuant à la lutte contre le changement climatique.

RAPHAËL BALDOS

Parce que la coopĂ©rative Biocoop Les 7 Ă©pis est une entreprise engagĂ©e et militante, elle finance cette chronique, nous permet de rĂ©munĂ©rer un journaliste professionnel, et de vous offrir une rubrique orientĂ©e solutions, dans l’objectif de vous donner des clefs pour agir


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