|
N° 431 - 2 janvier 2025
|
|
Le professeur Rouger, directeur de lâĂ©cole dâagriculture ambulante, aborde les questions des droits de la poule et des conditions de vie de lâĆuf. Mais pourquoi donc les poules ressentent-elles le besoin de se coller les unes aux autres, dans des conditions qui paraissent pourtant peu enviables ?
|
Entre informations scientifiques et propos plus discutables, poule mouillĂ©e et chair de poule, cette pseudo confĂ©rence investit Ă la fois le champ de lâabsurde et de la mĂ©taphysique pour reflĂ©ter par un regard aigu et dĂ©calĂ© des problĂ©matiques trĂšs actuelles⊠Fous-rires garantis !
|
|
|
|
|
|
Ariane Mnouchkine et le Théùtre du Soleil
|
Je nâavais pas prĂ©vu dâĂ©crire cette semaine, et puis je me suis rendu compte que jâavais des places Ă vous faire gagner, quâun numĂ©ro devait donc paraĂźtre ce jeudi⊠Aussi ai-je dĂ©cidĂ© de partager avec vous une expĂ©rience que, peut-ĂȘtre, jâaurais vĂ©cue plus tĂŽt si quelquâun mâen avait parlĂ© avec autant de dĂ©tails que ceux que je mâapprĂȘte Ă vous donner.
|
|
Ce samedi jâai dĂ©cidĂ© dâaller Ă la Cartoucherie, voir enfin un spectacle dâAriane Mnouchkine et du Théùtre du soleil. Et quand je parle dâexpĂ©rience il sâagit bien de cela. Dans le bus de retour trois dames parlaient de « voyage ». Je suis assez dâaccord avec le terme. Un voyage de presquâune journĂ©e, dans un ailleurs indĂ©finissable mais aussi dĂ©paysant quâun week-end dans un pays que lâon ne connait pas mais qui rĂ©sonne avec nos lectures, nos voyages, notre histoireâŠ
|
|
RĂ©server une place au Théùtre du soleil ne se fait pas comme au Palais Garnier ou au Zenith. Pas dâinternet, pas de ticket truc ou billet bidule. Un numĂ©ro de tĂ©lĂ©phone avec des vraies personnes au bout, pas de diĂšse ou dâĂ©toile Ă taper. Mais pas de rĂ©servation possible avant fĂ©vrier. Sauf que moi je veux y aller demain, pas dans deux mois. Et Ă la toute fin de la conversation â car câest une conversation â la voix amicale me souffle â oui, câest dit dans un souffle - quâil est possible de venir le jour mĂȘme deux heures avant, et de sâinscrire sur une liste dâattente (dont il nâest fait aucune mention sur le site internet). Et que la plupart du temps, les courageux candidats sont rĂ©compensĂ©s de leur patience. On dĂ©cide de tenter.
|
|
La 1 nous dĂ©pose Ă son terminus, ChĂąteau de Vincennes, oĂč lâon peut choisir de prendre un bus, une navette ou de contourner Ă pied le Parc floral et longer le bois de Vincennes. Vingt minutes de marche dans un froid glacial et lâentrĂ©e de la Cartoucherie, en petites lettres lumineuses, comme lâentrĂ©e dâune fĂȘte foraine du siĂšcle dernier. A partir de lĂ commence une sorte dâaventure oĂč lâon comprend trĂšs vite que personne ne va nous mĂącher le travail. Presquâau contraire. Lâimpression dâĂȘtre un mouton stupide houspillĂ© par des chiens de berger qui nâont pas de temps Ă perdre. Mais il y a aussi des gens trĂšs gentils : la compatissante blondinette Ă la caisse, le cosaque Ă toque de fourrure qui nous dira, Ă la fin « Ah, je suis bien content que vous ayez rĂ©ussi Ă entrer ! »âŠ
|
|
|
Câest le principe du lieu : des codes, des circuits, des Ă©tapes, des habitudes, dĂ©voilĂ©es partiellement, qui plongent le visiteur dans une forme dâinsĂ©curitĂ© finalement assez plaisante, comme lorsquâon se retrouve dans un pays Ă©tranger oĂč on dĂ©couvre progressivement une façon de vivre, de se dĂ©placer, de manger... Pas de flĂ©chage, surtout pas de cartels explicatifs, il faut gagner son sĂ©same en grapillant ici et lĂ des informations rĂ©vĂ©lĂ©es du bout des lĂšvres, ou rĂ©cupĂ©rĂ©es auprĂšs dâautres spectateurs, mais pas tant que ça. On voit bien quâil y a les Ă©lus, ceux qui ont un billet, et les autres, dont le nombre grandissant nous inquiĂšte un peu sur le rĂ©sultat final. Rentrerons-nous ou pas ? Le personnel du théùtre envoie des signaux contradictoires « Nây comptez pas trop, en ce moment il y a beaucoup de monde »⊠« On viendra vous chercher vingt minutes avant, peut-ĂȘtre cinq minutes avant, ou peut-ĂȘtre pas »⊠« Ne faites pas la queue »⊠« Allez vous mettre au chaud » « Ne regardez pas le tableau, ça ne sert Ă rien ».
|
|
Le tableau, câest un peu le symbole du Théùtre du soleil. Artisanal, humain, malin. A chaque reprĂ©sentation, deux grandes plaques sont accrochĂ©es Ă cĂŽtĂ© de la porte, sur lesquelles est imprimĂ© un plan de la salle. AprĂšs avoir rĂ©cupĂ©rĂ© leur ticket dâentrĂ©e Ă la billetterie, les spectateurs choisissent leur place. Les maĂźtresses de cĂ©rĂ©monie dĂ©collent le papillon correspondant et le collent sur le billet. Les « meilleures » places reviennent donc Ă ceux qui sont arrivĂ©s les premiers. La nique aux rĂ©servations internet ou aux abonnements pris Ă lâavance. Sâinvestir en Ă©tant lĂ trĂšs en avance est rĂ©compensĂ©.
|
|
|
Arriver Ă la Cartoucherie, câest le dĂ©but de lâaventure : le lieu est hors du temps, hors de toute connotation gĂ©ographique. On pourrait ĂȘtre en Lettonie, en Allemagne, en France ou Ă Moscou. Des roulottes. Dans des bidons brĂ»le un feu oĂč chacun se rĂ©chauffe les mains, accrochant Ă son manteau une odeur de fumĂ©e pour la journĂ©e. Pour sâinscrire sur la fameuse liste, une salle dâattente qui est dĂ©jĂ un dĂ©cor, oĂč il est facile dâimaginer les fantĂŽmes des guerres, les bureaux de renseignements, les dĂ©parts des conscrits, les femmes se pressant pour avoir des nouvelles du front, des retours des camps. Câest lĂ quâon viendra nous chercher, peut-ĂȘtre, sâil reste des places non attribuĂ©es quelques minutes avant le dĂ©but du spectacle. Presquâun symbole.
|
|
|
En attendant, nous avons comme les autres le droit â et presque le devoir â de rentrer dans le restaurant. A lâentrĂ©e il faut juste prĂ©ciser â comme un secret un peu honteux â quâon est sur la liste dâattente. On fait alors, une fois cette Ă©tape passĂ©e, presque partie des Ă©lus, on se fond dans leur masse calme et joyeuse. Si on avait eu un billet ce serait Ariane elle-mĂȘme qui lâaurait dĂ©chirĂ© ce billet. Car elle est lĂ , comme souvent, sa couronne de cheveux blancs accueillant le public. Emotion.
|
|
|
il y a une trĂšs grande salle Ă©clairĂ©e magnifiquement par des suspensions trĂšs basses, juste au-dessus des tables, comme dans une salle de lecture. Câest doux et chaud. Câest dâun calme hallucinant. Il y a ce sentiment trĂšs fort dâavoir de la chance dâĂȘtre lĂ . Une foule se presse le long dâun immense comptoir et on se dit « Ohlala, ça va ĂȘtre la cohue, il va falloir attendre des heures » et non, comme tout ce qui se passe ici, câest fluide, facile, sans rush, sans le moindre signe dâagacement ou de stress, en quelques minutes on se retrouve avec un plateau, des pirojkis et deux bortschs. DerriĂšre le comptoir, ce sont les acteurs qui servent, en costumes de cuisiniĂšres et marmitons russes, visages tendrement Ă©clairĂ©s par la lumiĂšre orangĂ©e, maquillage de scĂšne dĂ©jĂ , pour certains, bonnets de cuisine, chĂąle Ă fleurs. Ils se glissent sans heurts, sages, calmes comme des danseurs de tai chi, leurs visages sont dĂ©jĂ en scĂšne, dĂ©jĂ en jeu. Câest dĂ©jĂ tellement beau. Jâai encore en tĂȘte lâimage de cette femme qui prĂ©lĂšve la crĂšme fraĂźche dans un saladier, avec deux cuillĂšres, comme si elle prenait un oiseau dans ses mains, pour la verser tendrement dans chaque assiette de bortsch.
|
|
|
|
Au fond de la salle une carte de la Russie en couleur ocre, car oui, le dĂ©cor change Ă chaque spectacle. « Ici sont les Dragons » câest la premiĂšre partie dâune fresque historique mettant en scĂšne la naissance du bolchevisme, en Ă©cho Ă la guerre en Ukraine et la dictature de Poutine. La guerre de 14-18, la rĂ©volution bolchevique, constituent donc le socle du spectacle avec les figures de LĂ©nine, Trotski, Staline, Churchill⊠Mais si le travail de documentation et de synthĂšse est Ă©norme, câest bien sĂ»r cette mise en scĂšne qui Ă©poustoufle et coupe le souffle, pour qui voit pour la premiĂšre fois un spectacle de Mnouchkine : un théùtre immense (au sens propre) vivant, visuel, poĂ©tique, cinĂ©matographique, inventif. Un théùtre partiellement Ă vue, coulisses ouvertes. Câest beau, câest fort, ça bouge dans tous les sens sans cacophonie, câest plein de remises en question, dâidĂ©es, de recherche, de sens (pas un seul effet nâest en scĂšne pour faire effet, tout raconte quelque chose, de maniĂšre subtile, non dĂ©monstrative) et finalement, je suis contente de ne pas avoir commencĂ© ma carriĂšre de journaliste avec ce théùtre lĂ en rĂ©fĂ©rence, parce quâil me parait difficile de sâenthousiasmer pour une mise en scĂšne aprĂšs avoir vu çaâŠ
|
|
|
Lorsque lâon sort de la salle la nuit est bien sĂ»r tombĂ©e. Les gens restent longtemps, comme nous, hĂ©sitant Ă quitter cet autre monde, trainant dans la salle (qui nâa pas de portes, tout communique) scrutant les loges depuis le haut des escaliers, regardant les dernier·es comĂ©dien·nes se dĂ©maquiller par une fenĂȘtre dĂ©coupĂ©e dans un rideau, feuilletant des bouquins Ă la librairie, fumant une derniĂšre cigarette, buvant un eniĂšme thĂ© Ă lâorge. Il est plus de 18h, nous sommes arrivĂ©s Ă 13h. Dans le bus, il y a ce mĂȘme calme et cette femme qui parle de voyage. Vincennes, ligne 1 et retour. Faites-le au moins une fois dans votre vie.
|
|
|
|
Envoyez-nous un mail âšâš "magique" âšâš Ă cestparla@sortiesdesecours.com pour tenter de gagner des places (n'oubliez pas de nous donner votre numĂ©ro de tĂ©lĂ©phone)
|
|
|
"Vers les MĂ©tamorphoses", c'est le nouveau spectacle d'Etienne Saglio, qu'on aime beaucoup pour ses spectacles dits de "magie". Nous, on dirait plutĂŽt des spectacles magiques, oĂč les images qui se forment - on ne sait jamais trop comment - nous Ă©merveillent souvent. Cette fois, la poĂ©sie de Saglio devient un petit peu plus graphique, avec du carton et du dessin Ă la maniĂšre de Jean Jullien, des ailes de papier blanches et un visage dessinĂ© sur un carton. CachĂ© derriĂšre son masque multicolore, il va partir Ă la rencontre de celui qui pourrait ĂȘtre lui. Sur son chemin, il croise un chien, un gĂ©ant, son double miniature, se transforme en oiseau pour voler Ă tire dâaile...
|
|
|
Vous ĂȘtes organisateur de spectacles ? N'oubliez pas de publier vos Ă©vĂšnements dans l'agenda de Sorties de secours. Gratuit, avec ou sans crĂ©ation de compte, il vous permet de figurer chaque semaine dans le magazine que vous tenez entre les mains ! Clic ici
|
|
|
|
|
|
|
|