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Cette semaine, on a lu une merveille.
Une merveille graphique.
« Les voyages d’Ulysse » sont une boîte à merveilles dans laquelle on plonge avec ravissement, se saisissant tour à tour d’un plaisir puis d’un autre. Un gros pavé de 250 pages que l’on voit diminuer à regret au fur et à mesure de la lecture, en s’enthousiasmant crescendo de la créativité de ses auteurs…
Il y a un cadre narratif, une histoire, qui contient une histoire, et un cadre graphique, qui contient une œuvre. On croque alternativement ces délices, qui constituent un tout cohérent, riche et formidablement réussi, comme on tomberait dans une boîte de chocolats merveilleux...
« Les voyages d’Ulysse », c’est tout d’abord la rencontre d’un jeune peintre, Jules, avec la capitaine d’un bateau, Salomé, et leur quête des toiles d’un peintre, Ammôn Kasacz. Au fil du voyage – Alexandrie, Gibraltar, Ithaque - Salomé va raconter à Jules sa propre histoire et ce qui la relie aux oeuvres qu’ils recherchent. Un récit nourri des influences de la mythologie grecques – le navire de Salomé s’appelle « L’Odysseus » - et le portrait d’une héroïne forte, indépendante et singulière. Un récit, scénarisé par Sophie Michel, qui nous tient, nous emporte et nous exalte, transcendé par les magnifiques dessins d’Emmanuel Lepage, qui malgré une palette de couleurs assez réduite, fait éclater la solarité à chaque page, un bonheur de dessin et de trait. A eux deux, références et images recréent une ambiance qui mêle l’antiquité et le mythe, le passé et le présent, d’un onirisme discret, flottant comme un parfum. On pense à certaines images du « Mépris », à d’autres de « Pandora », ou encore aux rochers du « Grand bleu ». Sans jamais qu’aucune case ne s’affiche en bleu et blanc, on ne voit pourtant que ces couleurs, le soleil qui écrase les ombres, les oliviers et la roche crayeuse.
Sur des calques, des extraits des textes d’Homère, et en pleine page, des illustrations de René Follet (notre photo) correspondant aux toiles du peintre fictif Ammôn Kasacz. Cette œuvre dans l’oeuvre constitue le clou du spectacle, d’une beauté sans nom, qui nous coupe le souffle à chaque apparition au fil de la lecture, que l’on reprendra maintes et maintes fois comme une déambulation dans un musée, une épiphanie esthétique, ces rencontres avec une œuvre qui nous étreignent et nous laissent en larmes…
Sophie Michel est scénariste. Avec le dessinateur Emmanuel Lepage, qui s’est longtemps consacré à la bédé de reportage ( « Un printemps à Tchernobyl », « Voyages aux îles de la désolation », « Ar-Men, l’enfer des enfers »… ), ils cosignent une trilogie dédiée à leurs deux enfants : « Les voyages d’Anna », publié en 2005, « Les voyages d’Ulysse », en 2016, et « Les voyages de Jules », en 2019.
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René Follet est un illustrateur que l’on adore, dont l’esthétique porte la marque des années 50 à 70 et rappelle la patte de notre idole, Pierre Joubert, que l’on connaît pour les couvertures de la collection « Signe de piste ».
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