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N° 289 - DU 6 AU 12 JANVIER 2022

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On vous souhaite de continuer à vous enthousiasmer, vous émerveiller, vous passionner, du plus petit détail d'une herbe folle aux plus grands textes de théâtre, parce que l'essentiel de nos vies, hein, c'est l'émotion...

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"Lorsque le jazz tonitruant des dix-huit musiciens du Very Big Expérimental Toubifri Orchestra percute de plein fouet la parole vibrante du chanteur Loïc Lantoine, ça déménage ! Touchés par l’écriture brute et à fleur de peau de Loïc Lantoine, les musiciens ont écrit un spectacle autour de son univers, mêlant d’anciennes et nouvelles chansons du chanteur, tout en y ajoutant quelques morceaux inédits créés pour l’occasion. Un spectacle déjanté, puissant et poétique qui allie le son riche et complexe des instruments et la voix grave, chaude et rocailleuse de Loïc Lantoine, pour servir une parole écorchée vive, empreinte d’humanité."
> Samedi 15 janvier à 20h30, Le Dôme, Saint-Avé

Dans ce numéro

SORTIR. Notre sélection de la semaine

GERALDINE EN TRANSITION. Et si on adoptait une poule ?

INTERVIEW 06. Téléphoner à Denis Athimon

ON SAUTE DANS LA TWINGO. Autres mesures, à Rennes

STAGE. Du son au Strapontin

DEMAIN C'EST MAINTENANT. Décarbonons la culture

DESSIN. Gérard Darris croque le jazz

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On recommence tout doucement à reprendre le chemin des salles de spectacle ?

Ephémère
(Danse) La nouvelle création du chorégraphe morbihannais Gilschamber.
> Samedi 8 janvier, 20h30, Athéna, Auray

Les Arts Florissants : William Christie et Théotime Langlois de Swarte
(Concert) La rock star du baroque, William Christie, et un jeune violoniste prodige.
> Dimanche 9 janvier, 17h, l'Archipel, Fouesnant

Le fils
(Théâtre) Un texte de Marine Bachelot Nguyen, mis en scène par David Gauchard. Ou comment une femme bascule dans la radicalité des groupuscules catholiques intégristes.
> Mardi 11 janvier, 20h, Scènes du Golfe, Vannes

Jean-Pierre et le loup
Le nouveau spectacle de la Jo Coop Cie, interprété par Jean Quiclet et Stéphane Le Tallec, avec un orchestre de tourne-disques. A voir en famille
> Mercredi 12 janvier à 14h, L'Artimon, Locmiquélic
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Géraldine en transition

L’opération de la seconde chance

Et si nous commencions cette nouvelle année par une nouveauté « positive » ? Plutôt qu’un truc qu’on ne pourrait encore pas ou plus faire - ce qui est la teneur habituelle de cette chronique, ne nous mentons pas - j’ai décidé de parler plutôt de quelque chose qu’au contraire on POURRAIT faire. Une nuance qui fait toute la différence et qui me permet pour cette fois de ne pas jouer les rabat-joie. Quoique.

Au mois de décembre, au gré de mes balades sur les réseaux sociaux, je découvre l’association Les Caquetteuses à Sérent, près de Vannes. Avec un message à caractère d’urgence écrit très gros : « Sauvez des poules ! ». Mon petit coeur tout mou d’écolo fait un bond suffisant pour que je clique sur un lien, histoire d’en savoir plus.

Les poules de réforme
Sur le site des Caquetteuses, je découvre qu’il existe des poules dites de réforme. Oui, c’est tout nouveau pour moi, je découvre le monde de la poule. De réformé, je connais surtout celui qui il y a quelques années faisait tout pour échapper à son service militaire, étant prêt à tester toutes les combines qui ferait de lui un P4.

Revenons à nos poules, c’est le même principe. Une poule de réforme est une poule qui a fini son service quasi-militaire dans l’élevage industriel où elle était exploitée (ce n’est pas moi qui ai inventé le terme d’exploitation agricole) pour ses oeufs. A l’âge d’un an et demi, on lui offre une jolie promenade direction l’abattoir. Ce qu’on appelle la réforme est tout simplement le départ pour l’abattoir. La quille quoi. Mais on appelle plutôt ça le vide-sanitaire.

Voici donc la vie classique d’une poule d’élevage. A l’âge d’un jour, elle arrive en couvoir, où elle passe six mois à grandir dans un bâtiment chauffé. On est loin du mythe de la ferme et du petit poussin. A l’âge de 6 mois, cette poulette est acquise par un éleveur ou une éleveuse. Là, elle va passer une année de sa vie - ben en fait l’année de sa vie qui lui reste - dans un élevage où elle va pondre. Pour les élevages, c’est un peu comme les hôtels, y a des étoiles. Et l’étoile des élevages, c’est un chiffre sur l’oeuf. Mais contrairement aux hôtels, plus le chiffre est bas, mieux c’est, comme le classement au tennis.

Le matricule des poules
Regardons de plus près cet oeuf et son matricule.
oeuf
Le 0 signifie que c’est un oeuf bio.
Le FR que c’est un oeuf français.
Les trois lettres suivantes (KPR sur cet oeuf) identifient l’élevage.
Les deux chiffres suivants c’est le numéro du bâtiment.

Le marquage des oeufs permet donc à celui qui les consomme de savoir dans quel hôtel les poules qui l’ont pondu ont eu la « chance » de séjourner.

> 0, c’est bio donc. En plus d’une alimentation bio à 95 %, ces poules ne sont pas soignées en préventif aux antibiotiques (comme c’est le cas des autres), elles ont un accès extérieur, et d’un point de vue densité, on ne compte pas plus de 6 poules au m2.

> Le 1 correspond à la poule élevée en plein air. La bonne nouvelle, c’est que ces poules peuvent gambader dehors. La mauvaise c’est que cela ne garantit pas la qualité d'un terrain, parfois complètement bétonné. Côté intérieur, l’étau se resserre avec 9 poules au m2. Et des bâtiments qui peuvent contenir jusqu’à 15 000 poules. Encore une fois, on est loin de l’image d’Epinal de la poule qui picore du pain dur à la cool sur un mur.

> 2, ce sont des poules élevées au sol. En intérieur uniquement. Côté surface, on est aussi sur du 9 poules au m2. Si vous voulez voir à quoi ça ressemble, c’est comme ça par exemple. C’est tombé sur cette entreprise, ça aurait pu être une autre.

> Enfin, on va dans le pire, la poule élevée en cage, la numéro 3. Pas d’accès extérieur, pas de lumière du jour, espace de vie de 16 poules au m2. Je ne mets pas de lien de photos, je vous laisse regarder vous-mêmes… moi je n’y arrive pas.

Bonne nouvelle néanmoins, fin 2020, 64 % des poules pondeuses étaient élevées hors cages en France. Dit comme ça, ça ne ressemble pas à une bonne nouvelle, mais si, en fait, puisque c’était 53% en 2019, preuve que nous sommes de plus en plus exigeants sur la qualité de nos oeufs.

Un petit point de vigilance ?
Quasiment tous les produits cuisinés contenant des oeufs utilisent des oeufs 3, en cages (sauf en bio, puisque si le plat est bio, c’est que les ingrédients sont bio, et si l’ingrédient-oeuf est bio, c’est qu’il est 0). Sinon, n’en doutez pas, les industriels se feront un plaisir d’utiliser cet argument marketing, avec grosse mention «oeufs de plein air» sur l’emballage. Donc oeufs 1.

Et puis, encore une précision, même en bio, ce n’est pas forcément la panacée. Car on parle de poules au m2 au sein d’un bâtiment (avec une limite de 3000 poules par bâtiment en bio), mais on ne dit pas combien de bâtiments on a… On peut ainsi aller jusqu’à 24000 poules par élevage, en cumulant les bâtiments. Comme nous en parlions dans une précédente chronique bio ne veut pas forcément dire bon bio.

Une retraite dorée
Voilà donc nos poules qui viennent de passer une année un peu dure, pour certaines qui s’apprêtent à partir pour l’abattoir, parce que plus assez rentables. Le jeunisme existe aussi pour les poules. Elles sont souvent carencées, un peu malades (il va falloir payer des traitements…) un peu fatiguées (il va falloir les nourrir davantage pour qu’elles pondent) Pas une bonne affaire la vieille poule. Enfin pas si vieille : elle peut vivre en moyenne 5 à 10 ans. Ce qui fait quand même une retraite bien jeune, et surtout une mort prématurée. Et c’est là que nous pouvons agir ! En adoptant ces poules de réforme ! Elles sont certes un peu cabossées au départ, mais elles reprennent rapidement des couleurs, notamment quand les plumes repoussent, en retrouvant un bout d’herbe, et avec une ou deux autres potes. Cerise sur le gâteau, elles vont pouvoir normalement donner des oeufs une fois qu’elles se seront retapées, mais c’est pas l’usine, hein. On les adopte surtout pour leur offrir une retraite dorée, un peu comme nos retraités français en Thaïlande qui « profitent ». Et pour cela rien de plus simple, on va sur le site des Caquetteuses, entre autres, car il en existe plein à travers la France, et on regarde les sauvetages en cours. Et puis, on se retrousse les manches et on installe un poulailler dans le fond de son jardin. Et on est contents, parce qu’on a agi. Je vous l’avais bien dit.

Géraldine Berry. Janvier 2022
IG @geraldineberry_lorient
Imparfaite, incomplète mais engagée, j’essaye de participer au jour le jour à une société plus verte, persuadée qu’une goutte d’eau dans la mer, c’est déjà ça.


Quelques infos en plus

Chaque année, plus de 7 000 000 000 de poules pondeuses sont tuées à l’échelle mondiale. La plupart du temps pour finir en farine, croquettes, plats cuisinés, yummy. Ou simplement pour faire de la place pour leurs petites soeurs. Et les poussins mâles, on en fait quoi à votre avis ?

Des bonnes raisons d’adopter des poules en plus de leur sauver la vie et d’avoir potentiellement des œufs ? Et bien, les poules c’est sympa et très câlin. En ces périodes de Covid où on ne peut plus prendre personne dans ses bras, on kiffe ses poules. Ensuite, les poules réduisent à fond vos déchets organiques, un vrai compost sur pattes. Qui vont produire du bon fumier pour votre potager.

Les poules de réforme sont des poules dites « hybrides ». Pas de « vraie » race, mais des poules créées sur mesure pour être des super pondeuses.

Des bonnes ressources : le site de l’ONG CIWF (Compassion in World Farming) qui se bat contre l’élevage intensif, ainsi que le site de L214, pas besoin d’être vegan pour ouvrir les yeux et s’informer.

Poulehouse commercialise des oeufs certes un peu chers mais qui viennent d’un élevage qui n’envoie pas ses poules à l’abattoir. Sur leur site, une carte des lieux où on peut acheter leurs oeufs bio et de plein air et un film d’animation sympa à la Wallace et Gromit.

Une pétition à signer pour empêcher l’élevage des poules en cage

Parce que la coopérative Biocoop Les 7 épis est une entreprise engagée et militante, elle finance cette chronique et nous permet de vous offrir une rubrique orientée solutions, dans l'objectif de vous donner des clefs pour agir...
logo biocoop
rencontre_avec_michel_b_crédit Géraldine Le Tirant Lillico_1
Photo ©Géraldine Le Tirant

Rencontre avec Michel B. Bob Théâtre.

Vous avez repris le taf. On a repris le taf. Lundi 3 janvier, Morgane, du Strapontin, nous appelle pour nous proposer une interview par téléphone avec Denis Athimon. Ouais. Okay.
On s’échange trois textos. On lui propose 16h32, 17h37, ou 18h29, il choisit 16h32 « même si (il) préfère les chiffres ronds ». Il appellera à 16h31, ça coupe la poire en deux, on est tous les deux très contents. Même si moi, j’avais déjà oublié qu’on devait s’appeler : la reprise c’est pas vraiment ça, la patate du mois de décembre s’étant transformée en purée de marrons, janvier, c’est pas le mois de la fiesta. Mais, parfois, dans le plus mou des moments mous, surgit une boule à facettes, et merci Denis, on s’est franchement marrés lors de cet entretien.

Bon, d’abord parce que ce mec nous a toujours fait rire. On vous en a déjà parlé douze mille fois, notamment de notre spectacle culte, Princesse K, les créations (supposées être jeune public) du Bob théâtre vont directement faire bam avec notre goût de l’humour noir et grinçant. Et cette fois encore, ça devrait faire péter les papillotes. Une rencontre avec Michel B, « un vrai sale type, le méchant ultime », qui vient de sortir un bouquin Je suis différent, et alors ?

« Ne soyez pas tendus, parce que je le sens, quand vous l’êtes » (Brrr)


Athimon a écrit ce texte en « mettant le paquet. Je voulais en parler à fond. Je suis resté un an sur l’écriture, et ça s’est débloqué un mois avant la création, en octobre. J’étais en résidence dans une médiathèque, je leur avais demandé une sélection de livres de méchants, et ça a fait tilt avec la série de Manu Larcenet, Blast ». Dans la dernière partie, moins écrite, Athimon part « plus en impro, en free-style. Je m’éclate à le faire, à aller sur les interdits, j’en rajoute des caisses… ». Michel B parle de lui, au centre d’un carré blanc marqué au sol, 3m x 3m, une table et une chaise. On pense immédiatement à Dogville et à The Square, perdu, la référence c’est plutôt Le silence des agneaux, on rugit quand même de joie, on venait de citer Hannibal Lecter et ses festins, on supplie Athimon de nous laisser nous autoféliciter, c’est vrai quoi, y en toujours que pour les artistes, dans les interviews. Avec une référence pareille, on se doute donc que Michel B, c’est un peu plus qu’un méchant de conte de fées, mais plutôt un serial croqueur, et oui, Michel B est un ogre. Il va nous raconter sa première fois, lorsqu’il est parti en forêt se balader avec un copain et qu’il l’a mangé. Cru. « La première fois c’est toujours cru. Après on apprend comment on accommode, comment on cuisine, et comment on mange un enfant. Ce sont ses parents qui lui ont montré, à Michel B, les préparatifs des mariages d’ogres, les banquets… ». Michel B est un peu dangereux, c’est pour ça qu’il porte un bracelet de sécurité qui exploserait s’il sortait de son carré (remember Hannibal Lecter…). Michel B, c’est Athimon qui le joue, un seul en scène – enfin, pas tout à fait, parce que sur le plateau « il y a un type, qui ne dit rien, mais qui le regarde. Il y a un bouton rouge devant lui, pour pouvoir l’électrocuter si le bracelet ne fonctionnait pas. Le bouton est relié à une batterie fixée dans son dos, qui le plongerait dans un état catatonique ». Michel B a réfléchi pendant deux ans (et Athimon pendant 20 ans, depuis qu’il s’intéresse à la figure du méchant) et il s’est dit que ce serait « bien pour lui et pour les enfants de parler, que ce serait bien pour eux de savoir que dans la vie, il n’y a pas que des gentils »

> Mardi 11 janvier à 19h30 au Strapontin, Pont-Scorff. Un spectacle pour être saisi d’effroi, à voir à partir de 8 ou 9 ans, mais aussi, bien sûr, quand on est adulte et qu’on aime avoir peur (et certainement rire fort, on vous dit ça la semaine prochaine)
ON SAUTE DANS LA twingo
mesures
On sait que vous êtes nombreux à aimer, comme nous, la musique contemporaine, concrète, acousmatique, électroacoustique, expérimentale... Une musique rare en live, aussi on vous signale ce festival rennais, qui saupoudre la ville de concerts dans des lieux qui ne sont pas forcément des salles : Les Champs Libres, le Conservatoire, l’Hôtel Pasteur, le musée des Beaux-arts, le FRAC Bretagne, la Criée et l’Antipode MJC, du 12 au 23 janvier.
titre emballe STAGES
Stage son dans la création
Ce stage s’adresse aux metteurs en scène, aux techniciens et à toutes les personnes qui s’intéressent à la création théâtrale. Avec la compagnie Bouche Béé : Anne Contensou et Mickaël Plunian, metteure en scène et créateur sonore. Ensemble, ils proposent d’expérimenter très concrètement, avec un groupe de stagiaires, la construction d‘un univers sonore au théâtre : le choix et la pertinence de l’utilisation d’un son au regard d’une scène, sa captation, son montage, sa diffusion et son interaction avec le jeu au plateau.
> Samedi 5 et dimanche 6 février. Le Strapontin, Pont- Scorff
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Décarbonons la Culture

Le Shift Project, dont on vous a déjà parlé, est une association française créée en 2010 et un laboratoire d'idées qui s'est donné pour objectif l'atténuation du changement climatique et la réduction de la dépendance de l'économie aux énergies fossiles. Parmi ses dossiers, un onglet est réservé à la décarbonation dans la culture. Le magazine "Profession Spectacle" a consacré un article à Samuel Valensi, responsable culturel au sein du Shift Project et co-auteur du récent rapport intitulé Décarbonons la Culture ! Samuel Valensi cite notamment l'exemple du festival des Vieilles Charrues, dans cette interview qui donne quelques pistes...
Orchestre jazz - 01 12 2021
Et on retrouve les croquis de Gérard Darris, qui s'est glissé au sein de l'Orchestre de Jazz de Lorient pour y croquer les musiciens...