Quentin Rioual.
« Pour moi, le lieu c’est l’histoire, la géographie… L’espace, c’est là que je place ma réflexion »
8 juillet 2025. Isabelle Nivet

On vous invite régulièrement à pointer votre museau du côté de la Maison Germaine Tillion le dimanche. Le premier résident des lieux est aussi son co-directeur (en compagnie d’Amélie-Anne Chapelain, de la structure CAMP) et on a eu envie d’en savoir un peu plus sur son parcours, parce que vous l’avez probablement déjà croisé et vous le croiserez encore prochainement.
Une fois n’est pas coutume, ce portrait sera celui d’un parcours, celui de Quentin Rioual, parce que le chemin qu’il a suivi – un chemin de recherche et d’ouverture de portes – est long, riche et signifiant. Un enfant du coin, père docker et mère fileteuse, ça vous pose le contexte. Au collège, Quentin découvre le théâtre et il saute dedans à pieds joints, comme un enfant dans les flaques de pluie. La flaque va se transformer en ruisseau, puis en rivière, jusqu’à l’Océan, où aujourd’hui est revenu l’enfant du pays, qui vit désormais à Lorient.
Un retour après avoir usé ses semelles sur les planches de (l’option) théâtre de Jean Macé, à Lanester ; après une prépa littéraire à Nantes, puis Lyon, jusqu’au master, suivi d’un doctorat à Nanterre. Contourner le théâtre en passant par la littérature pour mieux y revenir. En parallèle avec son travail d’assistant dans une compagnie de théâtre, il écrit une thèse qui portera sur Maeterlinck et le décor. Sa référence absolue, le maître de l’épure et l’espace, Claude Régy.
« Pour moi, le lieu c’est l’histoire, la géographie… L’espace, c’est là que je place ma réflexion »
Et il devient enseignant. En 2019, Quentin présente sa thèse au Planétarium du Théâtre des Amandiers et décide de ne pas continuer à enseigner à l’université : « Je n’étais pas à l’aise avec le savoir descendant. J’ai préféré aller enseigner dans des écoles d’art, en scénographie et en dramaturgie. Me mettre au service de projets ». C’est à ce moment-là qu’il découvre l’œuvre de Georgette Leblanc, chanteuse lyrique, autrice d’un roman lesbien, compagne de Maeterlinck et sœur de Maurice Leblanc, créateur du personnage d’Arsène Lupin : « 600 pages de mémoire, un travail autour de la finitude et de la mort, ma thématique préférée, à partir duquel j’ai écrit le texte Dans une sorte de désert ».
Vient ensuite une rencontre importante avec David Geselson – dont vous vous souvenez sans doute, venu à Lorient à de nombreuses reprises et notamment pour « Lettres non écrites » et « Doreen ». Quentin entame une collaboration, qui se poursuit toujours : en 2025 ils travaillent ensemble sur sa prochaine création « Archives ».
Et ce n’est pas tout… Rioual est également à l’origine de différentes entités comme « OAQI », sa compagnie et « Augures Lab Scénogrrrraphie », réseau de professionnels qui travaille à réduire l’impact des scénographies dans le spectacle vivant et les expositions. Quinze ans après avoir quitté la Bretagne, Rioual tombe à Lorient sur le projet de diffusion nomade CAMP, piloté par Amélie-Anne Chapelain, et le duo décide de se rencontrer dans le travail : ateliers, carnets de projets, entretiens… Jusqu’à la création de la Maison Germaine Tillion où il va signer pour plusieurs rôles : écrivain public, capitaine d’ateliers d’écriture, intendant, codirecteur (jusqu’en 2028), et premier artiste en résidence dans les lieux, autour de la création « Je changerai vos fêtes », un titre issu de la prophétie d’Amos, dans la Bible. Une recherche sur le silence et la lenteur, le deuil et la vie, ou comment les morts nous accompagnent, un projet sur lequel il travaille en compagnie d’Emmanuelle Péron, rencontrée à Jean Macé. Quentin Rioual accompagnera également un groupe du centre médicosocial d’Hennebont pour une exposition à la Galerie Tal Coat sur la crise environnementale, et interviendra auprès des lycéens de l’option théâtre à Jean Macé. Et il aimerait développer à Lorient des ateliers d’éloquence.

L’horizon commence ici
Tout l’été, vous pourrez découvrir l’univers dramaturgique de Quentin Rioual dans un lieu exceptionnel, la pointe de Bernoulli (le bout du quai du Pourquoi pas, à l’arrière du K3) où, avec CAMP, va se poser ce nouveau campement artistique, à l’invitation de Lorient Agglomération, dans l’idée « d’activer l’endroit pour en voir les possibles et déployer une présence artistique témoin de la métamorphose de cet espace, qui fait l’objet d’un ambitieux projet de réaménagement, dans une dynamique de transformation à la fois sensible, expérimentale et collaborative ».
Du 12 juillet au 21 septembre, Pointe du Bernoulli, Lorient La Base. En savoir +
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