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Kadir Nelson et Marvin Gaye. Rock & Painting #10

 « Rock & Painting, c’est une série née sur Facebook en octobre 2019 dans laquelle j’associe chaque jour une toile et un morceau de rock. Dans laquelle j’associe mon amour de la peinture et du rock ». Catherine Pouplain

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Il y a quelques  temps, je remarque une couverture du magazine américain The New Yorker, une couverture très puissante qui représente George Floyd dont vous savez tous qu’il a été tué par un policier de Minneapolis le 25 mai 2020. Sur cette couverture, dessinée, et qui est titrée Say Their Names (Dites leurs noms), le corps géant de George Floyd porte en lui une multitude d’autres visages, les visages de ceux qui, comme lui, ont péri suite à des interpellations brutales de la police. Je n’ai pas besoin de vous redire qui est George Floyd dont le nom a fait le tour du monde en quelques jours et symbolise une fois de plus ce qu’endure la population afro-américaine, très souvent cible d’une répression policière outrancière. Et ça ne date pas de George Floyd. Et ce n’est pas qu’aux États-Unis. Mais le sujet aujourd’hui, ce n’est pas George Floyd ni les violences policières, – dédicace au journaliste David Dufresne – mais c’est celui qui a dessiné cette couverture, Kadir Nelson.

Depuis les années 2000, les couvertures de Kadir Nelson sur des thème historiques et politiques, depuis les noirs dans le base ball américain jusqu’à Martin Luther King ou Mandela, sont prisées par la presse américaine, une certaine presse plutôt très progressiste, dont effectivement The New Yorker pour lequel il est un des illustrateurs privilégiés depuis la fin des années 90. Mais on lui connaît aussi tout un boulot d’illustration pour des ouvrages de Spike Lee, Will Smith ou la danseuse Debbie Allen. Et des ouvrages jeune public.

Kadir Nelson est né en 74 dans une famille plutôt tournée vers les arts, sa mère est écrivain, un de ses oncles, peintre. Ultra doué dès l’enfance, il va faire de prestigieuses écoles d’art et en 96, à 22 ans seulement, à peine diplômé, il est engagé par Dreamworks, les studios de Steven Spielberg. Son style est très réaliste, très descriptif, très lyrique, peut-être un peu emphatique mais très beau et très digne. Sur une autre couverture récente du magazine rock et d’actualité Rolling Stones, on voit une peinture de lui reprenant le célébrissime tableau d’Eugène Delacroix, La liberté guidant le peuple. Il a remplacé la « Marianne » par une femme afro-américaine, une manifestante, poing levé. Derrière eux, une foule métissée, pas que noire – la dimension consensuelle n’est pas totalement absente de son travail – mais, on ne peut que trouver ça brillant.

Kadir Nelson a aussi travaillé pour la musique afro-américaine mais, étrangement, pas tant que ça.  C’est cependant ce qui nous intéresse aujourd’hui puisque cette chronique est partie d’un Rock & Painting entièrement consacré à Marvin Gaye que Kadir Nelson a peint plusieurs fois. Il en a même fait un timbre. Sur le tableau du jour, Marvin Gaye est assis dans une perspective qui rend ses jambes et son jean pattes d’eph’ géant au premier plan et dans une atmosphère de club, légèrement obscure. On lui connaît aussi des boulots sur Aretha Franklin ou le jazz des années 30/40. Une de ses plus grosses œuvres est une fresque de 2009 réalisée à la gloire de Michael Jackson, commandée par Michael Jackson lui-même après qu’il ait vu justement le boulot de Kadir Nelson sur Marvin Gaye.

Musicalement, bien sûr, j’ai choisi Marvin Gaye, sublime artiste emblématique de la musique noire américaine des années 60/70 et star de la Motown, le label de Detroit qui a produit un nombre incalculable de tubes mythiques. Marvin Gaye est mort brutalement, comme George Floyd et l’assassin n’était pas un policier mais son père, pasteur, avec lequel il avait entretenu une relation conflictuelle depuis toujours et qui l’a abattu en 1984. Marvin Gaye allait avoir 45 ans. Pour le Rock & Painting Kadir Nelson-Marvin Gaye, j’avais choisi le titre Inner City Blues extrait du chef d’œuvre qu’est l’album What’s Going On sorti en 1971. Cet album, il l’écrit suite à une dépression et à la mort de son amie Tammi Terrell en 1970 avec qui il avait chanté en duo à la fin des années 60. Et c’est un de ces duos que je voudrais vous faire écouter, sublime chanson certes sucrée et acidulée à souhait, mais c’est si bon parfois. Ça s’appelle California Soul.

Chronique diffusée dans La Quotidienne de Radio Balises le 22 juin 2020. https://radiobalises.com/

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